Au pré 
          
          Centaurées
          Grappes d'or et
          Bleuets, salsifis et
          Graminées confises
          Fécondes, 
          Dorées,
          Forgées de miel
          Gorgées d'ondes ultra-solaires
          Sont surprises à l'heure blonde
          Dans la colère confuse
          Des machines qui grondent
          Tondent et fauchent et couchent
          Fouettent, et coupent...
          
          Tombe l'herbe en bouquets...
          Les insectes, choqués
          Sondent l'air, le touchent
          L'écoutent
          Et regardent - équivoques - la prairie patraquée,
          Comme tronquée.
          
          L'Homme, Dieu du Danger.
          Voudrait-il tout manger ?
          La Terre, la Mer, le Ciel, empiler les Etoiles
          Empailler le Soleil en ses piles en métal ?
          
          L'Homme assis est passé
          Courroucé
          Et vissé par l'échine
          A la machine
          Le front plissé
          L'oeil froncé
          L'ombre cassée.
          
          Il a fauché les herbes
          Les a rangées
          Grangées
          En forteresses rondes :
          La provende des vaches
          Quand viennent nuits profondes
          Où la Vie s'enracine
          Où la Terre se calcine
          Où les Gnomes façonnent
          Dans le secret de l'ombre
          Les contours et les cimes
          De chênes
          Frênes et ormes
          Où les Gnomes dessinent
          Dans le pli de la roche
          Les prairies de demain
          Que l'Homme et sa machine 
          Sèment fauchent et piétinent.