Etranger

Etranger.
C'est un peu comme
Etre ange et...

Quand on lui enlève l'aile,
Le vol de l'ange
S'étrangle
S'affole
Devient étrange

Étrange vol de l'ange auquel
on n'enlève qu'une aile

Ça ressemble à une dune vue de profil
A une lune mobile
au bout d'un fil
et qui se balance, deci delà
pèle-mêle.

Être un ange sans ailes
Ou bien avec
On s'en fout,
me direz-vous,
Bien au sec
Dans le nid
Les hommes volent
Sans bec.

Mais
Toi, l'étranger
Etre en danger
Homme en sous-sol
Ange en sursis
Sans ciel
Sans nid
Et sans ailes
Au pluriel
Et sans même un asile
Au singulier

Asile
Ailes
Mêmes lettres
C'est pareil

Toi l'étranger
Ange en exil

Homme sans terre
d'asile

Comme une Mer
Sans île.

***

Dérivant
Au gré des vents

La vie
En avarie

Les rêves
Plein d'épices
Poivrés
Dorés

Mais le coeur et le corps
Dévorés
Chavirés
Avariés
 
Un soir
D'hiver
Ton navire
Arriva

Toi dedans
Toi, ton aile
tes dents
tes bras
tes mains
tes yeux
rivés
à la terre désirée.

C'est la terre des fourmis
Mais si peu des cigales

C'est l'endroit des fourgons
Des paniers à migales

L'accueil
S'y fait rare

Les hommes
Y font les morts

Et les rats
Font les forts.

Un pays de frontières
de fermetures
de procédures
de filatures

Où les camps de torture
Et les rafles d'hier
Sont plus qu'un souvenir :
Un programme à venir
Pour purger le troupeau
Sous couvert de vernir
Les couleurs du drapeau.

Pourtant
Sous la terre des fourmis
Sous leurs usines
Sous leurs buildings
Sous leurs plannings
D'épuration
Dans leurs stations
De stockage d'hommes
Là, juste sous leur nez,
Jusque dans leurs narines

Il y a comme
Un bruit
Continu
Quelque chose qui gratte
Qui pousse
Qui vit
Qui vibre
Qui voit le bleu
derrière le gris

Comme un vent
Sur la peau

Il y a
Comme un appel
Comme un appeau

Comme un air
Effronté
Fier
Prêt à fronder
Affronter
Les adolpheurs d'hier
Les bâtisseurs de murs
Les râtisseurs de mort

Effriter leurs frontières
Echanger
Leurs bannières périmées
Leurs barrières âbimées
Leurs tanières déprimées

Contre un bel Age d'Or
Où nous tous,
Hommes étranges
Et déplumés

Irons où bon nous semble...
Nous volerons ensemble
Semblables à des anges
Sauvages,
Pareils à la fumée,

Confondus aux nuages.